Fabriquer un film d’animation Disney est un long processus créatif, de la genèse à la projection, c’est un voyage épatant mais qui n’est pas sans difficultés et parfois le réalisateur recycle des scènes de réalisations précédentes. Réutiliser des scènes est une façon d’accélérer la production d’un long-métrage en maîtrisant les coûts et limitant la prise de risques. Alors sensation de déjà-vu ?
Choix artistique ou économique, la récupération de scène, ou rotoscopie prend une place importante au sein des studios de Burbank entre 1960 et 1970. Plusieurs raisons expliquent cette montée, en effet, les échecs consécutifs de plusieurs longs-métrages d’animation redéfinissent les priorités de la société qui se concentre désormais sur les films en prises de vues réelles, la télévision et le parc Disneyland. Le choix de cette nouvelle ligne réduit de fait l’investissement dans la branche animation et la mort brutale du créateur du studio en 1966, Walt Disney, ne fera qu’accentuer la perte de repères et le manque d’inspiration de la branche animation qui recycle abondamment. Retour sur les réutilisations les plus remarquables.
Merlin, recyclé et transformé par enchantement
Vingt-deuxième long-métrage d’animation du studio de Mickey, Merlin l’enchanteur, fable moyenâgeuse aussi légendaire que magique cache de nombreuses scènes réutilisées. De Sire Hector frappant d’une lourde épée la tête de Sire Kay, réutilisation d’une des âneries de Jasper et Horace des 101 dalmatiens en passant par Madame Mim et sa transformation, duplicata de l’envol avorté d’un tigre échappé du court métrage de Dingo datant de 1945.
Le recyclage le plus présent de la production est la scène du duel entre les deux chevaliers, réutilisation à peine modifiée d’une scène du court-métrage The Truth about Mother Goose. Le court-métrage de 1957, réalisation de Bill Justice et Wolfgang Reitherman, ce dernier étant aussi le réalisateur de Merlin l’enchanteur.
La Jungle de Mowgli
Les aventures de Mowgli au cœur du Livre de la Jungle, autre réalisation de Wolfgang Reitherman sont l’occasion de voir quelques scènes recyclées. Les jeunes loups dont le premier saute du haut d’un rocher, rappelle le premier saut du canapé des petits dalmatiens de Pongo et Perdita, la tête de Bagheera qui heurte un tronc d’arbre tel Grognon, célèbre nain râleur et sa désagréable rencontre avec un pont que le réalisateur recycle avec brio.
Autre reprise majeure, l’incroyable chahutage de Mowgli, promené entre le Roi Louie, Baloo et Bagheera, une scène qui recycle ni plus ni moins la poursuite entre Crapaud Baron Têtard, Monsieur Rat et les Furets issus du long métrage Le Crapaud et le Maître d’école.
Robin des bois, prince des voleurs
Très marquée par la réutilisation d’éléments d’œuvres précédentes, la réalisation recycle aussi un acteur, Phil Harris, interprète de Baloo de nouveau ours sous les traits de Petit Jean. Épopée d’un renard voleur au cœur de Nottingham, le long métrage transforme la poursuite d’Alice et la reine de Cœur dans le labyrinthe du pays des merveilles en un hasardeux chassé-croisé entre les tentes de Robin des bois.
La danse ne semblait pas inspirante pour les animateurs, en effet, de nombreuses réinterprétions musicales ponctuent le long-métrage. La célébration de Petit Jean, riche en similitudes avec la danse du duo formé par le Roi Louie et Baloo, la valse de la belle Marianne réplique de la danse de Blanche–Neige et les 7 nains. La fête endiablé des Aristochats inspire de son côté le joyeux ballet de Dame Marianne et Robin des bois.
Christopher recycle Mowgli
Les trépidantes aventures du plus attachant des ours cachent deux scènes réutilisées, la déambulation en équilibre de Mowgli devient ainsi la promenade de Christopher Robin et du plus grand amateur de miel. La seconde inspiration provient elle aussi du Livre de la Jungle, dans un geste répliqué avec exactitude le jeune Christoper Robin imite Mowgli et lance au loin son petit caillou. Ces recyclages ayant bénéficié de peu de modifications, les deux scènes laissent une profonde sensation d’écho.
Le tour du monde de Bernard et Bianca
Les deux célèbres souris, Bernard et Bianca, dissimulent quelques reproductions dans leurs valises, la jungle, lieu des nombreuses promenades de Mowgli devient bayou, cadre des recherches des gentils rongeurs. Bambi bénéficie lui aussi d’une revisite façon bayou, ainsi le petit faon et sa mère en plein paysage neigeux offre désormais un environnement bien plus verdoyant.
Pratique désormais volatilisée des réalisations, la reprise de scènes apparaît malgré tout de façon rarissime, mais on ne recycle plus, on rend hommage. La princesse et la grenouille fait ainsi apparaître le mélodieux Louis mimant le temps d’une scène l’improbable coiffure de Madame Mim, méchante magicienne de Merlin l’Enchanteur, une dédicace aussi charmante que bienveillante.